Le samedi 29 juin 2019 l’Association d’Histoire de Westhoffen et Environs (AHWE) a reçu les membres de l’Association pour la Sauvegarde de la Maison Alsacienne (ASMA) pour un Stammtisch dans la salle du Conseil de la Mairie de Westhoffen. Cet événement mensuel qui d’ordinaire se tient à Strasbourg, était ouvert à tous les passionnés du bâti ancien.
Quels ont été les thèmes évoqués ?
Qu’est-ce que l’ASMA ?
Forte de 47 ans d’existence et comptant plus de 600 adhérents, l’Association pour la Sauvegarde de la Maison Alsacienne est un acteur essentiel de la préservation et de la valorisation du bâti ancien en Alsace. Composée de passionnés et de professionnels bénévoles spécialistes du patrimoine (artisans, architectes, ingénieurs, urbanistes, architectes du patrimoine…) l’ASMA œuvre au quotidien à la sensibilisation des propriétaires de maisons anciennes mais aussi à la préservation et à la valorisation d’un bâti emblématique de l’Alsace.
En quoi consistent les Stammtisch organisés par l’association ?
Une fois par mois dans le Bas-Rhin, et tous les deux mois dans le Haut-Rhin, l’ASMA organise un moment d’échange, permettant aux heureux propriétaires (ou futurs acquéreurs) de maisons alsaciennes d’exposer leurs problématiques et d’y répondre ensemble, avec le soutien d’experts et de passionnés du domaine. Les participants apportent des photos sur une clef USB de leurs maisons qui servent de support pour des échanges sur des thématiques comme l’architecture, la charpente, l’isolation, la couverture… Il n’est pas rare de voir des habitués revenir pour partager leurs expériences ou se tenir au courant des évolutions en matière d’outils et techniques de rénovation du bâti ancien.
Retour sur cet événement à Westhoffen
Le Stammtisch a commencé par un tour de table des participants qui ont exposé leurs projets et les problèmes rencontrés.
Le premier cas abordé était celui d’une maison dont le ravalement avait été refait il y a quelques années. Sur les photos présentées par le vidéoprojecteur, on a pu observer que la poutre sablière d’un pignon était en très mauvais état. La raison : une infiltration d’eau et une peinture plastique trop étanche qui n’a pas laissé respirer le bois. Résultat : le bois a pourri à l’intérieur et le propriétaire ne s’en est aperçu que très récemment, lorsque la peinture qui maintenait le bois a fini par tomber. Les experts de l’ASMA sont alors intervenus pour proposer des solutions au propriétaire. Nous étions face à un cas de figure classique car réparer ce type d’élément sur une maison alsacienne relève de l’intervention courante de certains artisans spécialisés dans l’ancien qui pratiquent une espèce de « chirurgie » pour remplacer ce qui est vermoulu par une pièce façonnée sur mesure. Le site de l’ASMA www.asma.fr donne une liste d’artisans en mesure de réaliser ce type de travaux pour tous les corps de métier .
Le cas suivant était celui d’un corps de ferme à Merkwiller-Pechelbronn qu’un couple souhaitait acquérir, dont les enduits prêts à l’emploi inadaptés recouvraient le torchis. Comme pour le cas précédent, les produits utilisés étaient si étanches qu’ils empêchaient le mur de respirer et étaient susceptibles de créer des problèmes d’humidité à l’intérieur de la maison. Là encore les experts se sont exprimés : idéalement, pour la rénovation d’une maison ancienne, le matériau recommandé est le béton de chanvre, qui lui, est un isolant perspirant dont ils évoqueront les bienfaits dans la suite de ce Stammtisch.
La maison comportait également des fenêtres en PVC. Était-ce efficace ? Pas plus que des fenêtres en bois. Était-ce écologique, économique et durable ? La réponse est : non car le PVC de la fenêtre devient fragile avec le temps et vieillit prématurément lorsqu’il est exposé au soleil. Résultat : quand les fenêtres se dégradent, il faut les changer complètement. Ce qui n’est pas le cas d’une fenêtre en bois qui peut être entretenue et réparée.
Un point de vigilance a été donné aux futurs acquéreurs de maisons anciennes : Une maison rénovée avec des matériaux inadaptés peut coûter plus cher en travaux de remise en état qu’une maison dont l’état intérieur est proche de celui du siècle dernier. En effet, il faut alors rajouter les coûts pour déposer les anciens revêtements, quelquefois une dalle de béton qui a été coulée pour créer une salle de bains , et au final peuvent s’avérer supérieurs à ceux d’une maison aux murs nus.
Ce fut ensuite au tour du propriétaire d’une grange du début du XIXè siècle avec soubassement en grès des Vosges de présenter son cas. Ce dernier se questionnait quant à l’action la plus adaptée à son bien : Démolition ou restauration ? Chacun s’est penché sur le sujet. La charpente en chêne était en bon état, mais de nombreuses tuiles à simple recouvrement étaient déjà tombées et nombre de bardeaux étaient déplacés provoquant trous dans la toiture et infiltrations d’eau. Des tuiles menaçaient de tomber dans la cour , ce qui représentait un risque important pour la sécurité des habitants. Par ailleurs , la grange étant dans un périmètre historique, un permis de démolir ne serait jamais accordé. En revanche, il est possible de préserver le bâtiment en refaisant la toiture… Concernant le coût : afin de le minimiser, suggestion a été donnée de remplacer les vieilles tuiles Biberschwanz par des tuiles mécaniques type tradi 13. Autre suggestion quant à l’avenir du bâtiment : le transformer en garage ou le vendre à un acquéreur souhaitant le rénover. A l’issue de la réunion, le propriétaire semblait décidé à faire effectuer les travaux nécessaires par un artisan qu’il avait précédemment consulté.
De nouvelles photos se sont enchaînées et l’on s’est intéressé à la situation d’un futur acquéreur d’une maison alsacienne à Kirrwiller qui avait déjà signé une promesse de vente auprès d’un notaire. Cette maison disposait d’un puisard dans la cave et le futur propriétaire envisageait de rehausser le sol avec du béton suite à une inondation récente. Conseil lui a été donné de signaler un possible vice caché au vendeur puis de consulter un technicien du SDEA en vue d’installer un raccordement vers l’assainissement de la rue, avant de se lancer dans des travaux qui ne résoudraient en rien le problème.
La séance s’est achevée avec le partage de photos : celle d’une maison à Haguenau datant du XVIIIème siècle. On a pu admirer un magnifique porche en grès en forme d’anse de panier, celle d’une jolie ferme habilement restaurée ainsi que celle d’une petite grange de Wahlenheim prochainement remaniée en gîte.
Ci-dessus : en haut à gauche, des morceaux de béton de chanvre. Sur la droite, des tuiles Biberschwanz artisanales En bas, de la paille de chanvre et des granulés de liège expansé
Un matériau dont on parle de plus en plus : le béton de chanvre
Composé de paille de chanvre et de chaux, cet isolant présente les propriétés suivantes : une très longue durabilité ( un siècle ), une empreinte environnementale faible et une porosité offrant de bonnes propriétés thermiques, hygrométriques , acoustiques et même coupe-feu. Il est à noter toutefois que lors de l’élaboration et de l’application du béton de chanvre, le temps de séchage est de l’ordre d’1cm par semaine et que l’épaisseur recommandée est en moyenne de 15cm .
Un article complet sur le sujet est à consulter dans la revue ‘s Blättel n°27 éditée par l’ASMA.
Les choses à faire quand vous voulez rénover votre maison Alsacienne : conseils d’experts
- Pour les poutres / colombages : huile de lin et térébenthine ou lasure non filmogène. Eventuellement une peinture à l’ocre (en sachant qu’il faudra remettre une couche 2 ans plus tard et donc envisager de remonter un échafaudage…) Si vos colombages sont en chêne, vous pouvez même ne rien mettre du tout !
- Fenêtres en bois ( voir artisan recommandé sur le site de l’ASMA )
- Vigilance sur la qualité de la couverture. Sous rampant, vérifiez que vous disposez d’une membrane coupe-vent type écran sous toiture HPV ( haute perméabilité à la vapeur ) dans la partie tournée vers l’extérieur. Cela permettra de garder une bonne qualité d’isolation en la protégeant des effets du vent tout en évacuant l’humidité. Une maison alsacienne dont la toiture est en bon état sera suffisamment protégée des intempéries pour tenir des décennies .
- Isolation des murs en chaux-chanvre (appelé aussi béton de chanvre). Matériau perspirant qui permet d’assurer une isolation efficace et une bonne gestion de la température tout en repoussant les rongeurs. Le béton de chanvre bien employé peut assurer une isolation de la maison pendant près de 100 ans !
Les choses à éviter quand vous voulez rénover votre maison Alsacienne, suite des conseils d’experts
- Peintures plastiques qui ne laissent pas respirer le support sur lequel elles sont appliquées .
- Fenêtres en PVC
- Isolation des combles sans la pose de coupe-vent .
- Isolation extérieure de la maison à l’aide de matériaux synthétiques (polystyrène, plastiques…) qui empêchent les murs de respirer et favorisent la dégradation rapide des parois et boiseries de la maison alsacienne. À ce propos : le décret de 2016 qui obligeait l’isolation thermique de l’habitat par l’extérieur n’est plus en vigueur pour les maisons construites antérieurement à 1948.
De manière générale, soyez vigilants quant au choix des matériaux lors de la restauration d’une maison ancienne. Privilégier des solutions durables et économiques sur le long terme.
A l’issue de ce Stammtisch, 5 personnes présentes ont adhéré à l’ASMA.
Si vous souhaitez en savoir plus, rendez-vous sur le site internet de l’ASMA